Comme nous l’avons vu dans notre article, « Comment élaborer un Schéma Directeur des Systèmes d’Information », le Schéma Directeur joue le rôle de boussole stratégique pour la DSI, définissant les objectifs à atteindre sur une période de 3 à 5 ans. Il précise les cibles, les réalisations attendues, la feuille de route des projets ainsi que le modèle de gestion opérationnelle associé.
Cependant, pour définir une trajectoire claire et précise, il est essentiel de savoir d’où l’on part. Avant de définir les orientations futures, il est donc crucial de comprendre l’état actuel de sa maturité, en termes de systèmes d’information.C’est pourquoi la première phase du processus de mise en place d’un SDSI, celle du diagnostic de l’existant, est fondamentale. Elle constitue le socle sur lequel repose la stratégie à venir, garantissant que les décisions futures soient en adéquation avec les réalités opérationnelles et contraintes actuelles.
Le référentiel ITIL indique qu’il faut toujours interroger le « Où sommes-nous actuellement ? », l’occasion rêvée pour prendre un peu de hauteur sur le chemin parcouru.
L'analyse de l'existant consiste à réaliser un état des lieux complet des systèmes d'information (SI) d'une entreprise. Cette démarche repose sur trois axes principaux :
L'analyse de l'existant débute par une compréhension approfondie de la stratégie globale de l'entreprise. Les systèmes d’information doivent en effet soutenir et accélérer la réalisation des objectifs stratégiques.
Comme nous l'avons abordé précédemment, le SDSI doit s’aligner sur la stratégie d’entreprise (approche top-down). Pour cela, il est essentiel de recueillir les axes et ambitions stratégiques de l’organisation, les besoins spécifiques des différents départements métiers (marketing, finance, RH, etc.) ainsi que ceux des partenaires externes tels que les partenaires commerciaux, fournisseurs et sous-traitants.Ces acteurs externes jouent souvent un rôle clé dans la conformité, la collaboration ou encore la compétitivité de l’organisation. Cette démarche garantit que les initiatives technologiques sont alignées avec les enjeux réels de l’organisation, optimisant ainsi l'efficacité des solutions déployées.
Le diagnostic de l'existant doit également s'attacher à identifier les ambitions internes de la DSI. Il s'agit de comprendre comment la DSI perçoit ses missions, ses objectifs à long terme, et de quelle manière elle s’organise pour les atteindre. L'évaluation de l'offre de services de la DSI dans sa globalité permet de déterminer dans quelle mesure celle-ci répond aux besoins des métiers et des utilisateurs finaux. En parallèle, l’analyse du modèle opérationnel et de la gouvernance de la DSI éclaire sur les processus décisionnels, les priorisations de projets et l'allocation des ressources.
Cette vision interne permet de repérer les éventuels points de blocage ainsi que les opportunités d’amélioration dans la gestion des services IT.
Enfin, l'analyse de l'existant inclut un diagnostic de l’architecture du Système d’Information de l’entreprise, c’est-à-dire l’organisation et la structure des différentes composantes du SI. Il est essentiel d'identifier les inefficacités, les redondances, ou encore l'obsolescence des systèmes, afin de proposer des améliorations favorisant l’agilité du SI.
Cette étape passe par une analyse de l'architecture fonctionnelle, applicative ainsi que des services qui soutiennent les opérations Métiers. Un examen approfondi de l’infrastructure actuelle (serveurs, réseaux, bases de données, etc.) permet de mesurer la performance, la sécurité et la capacité d’évolution des technologies en place.Concernant les aspects de cybersécurité, il est préconisé de réaliser des tests d’intrusion pour établir un point de situation et projeter des actions correctives nécessaires à hygiène de votre infrastructure.
Le diagnostic de l'existant des systèmes d’information est une étape stratégique essentielle pour toute DSI cherchant à maximiser sa performance et à s’aligner avec les objectifs globaux de l'entreprise. Il répond à plusieurs enjeux clés :
Avant toute transformation, il est crucial de s’assurer que les systèmes d’information soutiennent efficacement la stratégie globale de l’organisation.Le diagnostic permet de mesurer dans quelle mesure les SI contribuent à la réalisation des objectifs métiers, et d’identifier les ajustements nécessaires pour mieux aligner les priorités IT et business.
Un audit complet des systèmes en place aide à repérer les inefficacités, les redondances et les goulots d’étranglement. Il s’agit d’une opportunité pour analyser la performance actuelle, tant en termes de processus que d’infrastructure, et de proposer des axes d’amélioration concrets.
Le diagnostic permet à la DSI de formuler des recommandations précises pour structurer et prioriser les projets SI à venir. Ces préconisations sont basées sur des données factuelles et des retours d’expérience, offrant ainsi une meilleure visibilité sur les décisions à prendre et sur les ressources à allouer.
Un SI performant ne se limite pas à répondre aux besoins techniques ; il doit aussi être un levier pour la création de valeur. En réalisant un diagnostic, la DSI peut s’assurer que ses services sont véritablement en phase avec les attentes des métiers et qu’elle contribue activement à leur succès.
Le diagnostic permet également de mesurer la capacité des systèmes à évoluer avec les nouvelles exigences métiers et technologiques. Il devient alors un levier pour bâtir une infrastructure plus flexible et moderne, capable de répondre aux besoins futurs de l’entreprise.
Ignorer le diagnostic de l’existant dans le cadre d’un Schéma Directeur des Systèmes d'Information (SDSI) expose l'entreprise à de nombreux risques.
Cette phase d’évaluation initiale permet non seulement de comprendre l’état actuel des systèmes d’information (SI), mais aussi de garantir que les décisions à venir sont fondées sur des données tangibles. Sans ce diagnostic, les conséquences peuvent s’avérer critiques pour la performance, l’efficacité et la pérennité de la DSI.
Nous avons identifiés ci-dessus 5 points sur « pourquoi réaliser ce diagnostic de l’existant », voyons ici plus en détail les risques de ne pas le faire :
Sans diagnostic, la DSI court le risque de déployer des solutions qui ne répondent pas aux réels besoins des métiers. Cette désynchronisation entraîne des incohérences stratégiques, car les systèmes d'information ne soutiennent plus les priorités business, et les départements Métiers se retrouvent avec des outils inadaptés. À terme, cela limite la capacité de l'entreprise à atteindre ses ambitions stratégiques et réduit son efficacité opérationnelle.
En l'absence d'une évaluation claire de la situation actuelle, les décisions stratégiques se basent davantage sur des perceptions ou des hypothèses que sur des données concrètes. Ce manque de visibilité empêche la DSI de prioriser efficacement ses projets et ses investissements. Les ressources peuvent alors être mal allouées, avec des conséquences financières significatives.
Investir dans des solutions coûteuses qui ne correspondent pas aux réels besoins de l'entreprise risque de gaspiller des fonds précieux et de freiner les initiatives de transformation digitale.
Sans diagnostic préalable, les dysfonctionnements au sein des systèmes d’information persistent et s'aggravent.
Des processus inefficaces, des doublons dans les solutions technologiques, et des systèmes obsolètes continueront à freiner la productivité.
En conséquence, l’entreprise voit ses coûts opérationnels augmenter sans pour autant améliorer ses performances. De plus, les goulots d’étranglement identifiés trop tard peuvent entraîner des retards importants dans la mise en œuvre de nouveaux projets, rendant l’entreprise moins agile face aux défis du marché.
Sans une compréhension claire de l’état actuel des systèmes, l’entreprise s'expose à une perte de compétitivité. Les risques financiers, comme abordés précédemment, sont considérables : maintenance excessive de systèmes obsolètes, investissements inappropriés, ou encore incapacité à anticiper les nouvelles technologies. De plus, ces erreurs stratégiques conduisent souvent à un gaspillage de temps à revenir sur des décisions qui auraient dû être claires dès le départ. Chaque projet retardé ou mal planifié est une opportunité perdue pour l'entreprise de rester compétitive dans un environnement en constante évolution.
L’absence de diagnostic ne se traduit pas uniquement par des inefficacités techniques ou financières. Tous ces éléments réunis peuvent amener une frustration croissante des équipes métiers et de la DSI. Lorsque les systèmes ne répondent pas aux besoins, il existe le risque que les utilisateurs finaux se démotivent, ce qui pourrait impacter négativement leur productivité et leur engagement. Par ailleurs, la mauvaise gestion des attentes et la livraison de solutions inadaptées créent des tensions entre la DSI et les autres départements. Cette déconnexion entre la DSI et les métiers finit par altérer la collaboration, sapant la confiance nécessaire pour mener à bien des projets stratégiques communs. Au final, cela peut nuire non seulement à l’efficacité des opérations, mais également à la culture d’entreprise et à l’adhésion aux initiatives technologiques.
L’analyse de l’existant dans le cadre d’un Schéma Directeur des Systèmes d’Information (SDSI) doit impérativement être réalisée à travers trois perspectives complémentaires : métier, systèmes d'information (technique), et organisationnelle. Ces trois angles d’analyse permettent d’obtenir une vision globale des forces, des faiblesses et des opportunités d'amélioration des systèmes d’information actuels, en tenant compte de leur adéquation avec la stratégie globale de l'entreprise.
L'analyse métier se concentre sur la manière dont les systèmes d’information soutiennent les activités quotidiennes et les objectifs stratégiques de chaque département. Il s’agit ici de vérifier l’alignement des systèmes d’information avec les besoins métiers et les objectifs stratégiques de chaque département.Tout d’abord en analysant les fonctions ainsi que les besoins et les attentes des métiers.
Le premier objectif est donc de comprendre le rôle, l’implication et le fonctionnement de chaque métier à travers des entretiens ciblés ou des questionnaires Métiers.
Toujours dans le cadre de cet entretien, on doit comprendre comment chaque métier utilise les outils SI pour réaliser ses missions, et dans quelle mesure ces systèmes répondent à leurs attentes. Il s'agit d'identifier les besoins spécifiques de chaque service (ex. finance, RH, production, marketing, etc.)À la fin de ces entretiens, on doit être capable de dresser un tableau précis des exigences fonctionnelles propres à chaque métier : productivité, automatisation des processus, gestion des données, ou encore reporting. (L’audit peut aussi identifier des besoins non formulés, comme l’intégration d'outils de collaboration, ou des fonctionnalités de gestion de la donnée plus avancées pour les décisions stratégiques)
Le second objectif est d’évaluer l’adéquation des outils actuels avec les objectifs métiers.Une fois les besoins métiers clarifiés, il est crucial d'évaluer l’efficacité des outils SI en place. Cette évaluation vise à répondre à plusieurs questions :• Les solutions en place permettent-elles de répondre aux attentes métiers ? • Sont-elles suffisamment agiles pour évoluer avec les besoins changeants ? Par exemple, si un CRM ne permet pas d’exploiter pleinement les données clients pour améliorer la fidélisation, cela pourrait constituer une faille dans le système informationnel.Il est également pertinent de vérifier si les solutions technologiques facilitent la prise de décision en fournissant des données fiables et en temps réel.
L’objectif final de cette phase est de dresser un bilan des faiblesses et des opportunités d’amélioration. Il s'agit de mettre en évidence les dysfonctionnements, comme les processus trop manuels ou des outils sous-exploités, ainsi que les gains potentiels en termes d'efficacité ou de performance.Ce diagnostic permet de dégager des axes d’amélioration concrets, tels que l’intégration de nouvelles technologies ou l’automatisation de tâches chronophages. Une fois ces informations collectées, il devient possible d’analyser les processus métiers dans leur ensemble, et de déterminer si les systèmes d’information permettent aux équipes de remplir leurs missions de manière fluide et productive.
Exemple de matrice à utiliser : Matrice SWOT
L’audit des infrastructures technologiques de l’entreprise consiste à effectuer un état des lieux complet des matériels, logiciels, bases de données, et réseaux utilisés par l’organisation. L’objectif principal de cette phase est d’évaluer la robustesse, la performance, la sécurité, et l’évolutivité des infrastructures et applications SI.
L’objectif premier du diagnostic technique est de réaliser un inventaire complet des infrastructures existantes : serveurs, réseaux, systèmes de stockage, bases de données, etc. Cet audit doit inclure une évaluation de la performance de ces infrastructures (temps de réponse, disponibilité, résilience), ainsi qu’une vérification de leur niveau de sécurité face aux cybermenaces (gestion des accès, pare-feu, conformité aux réglementations comme le RGPD).Il est également important de mesurer la capacité d’évolutivité des infrastructures, afin de savoir si elles pourront supporter les futurs besoins de l’entreprise, par exemple avec la migration vers des solutions cloud ou l’intégration de nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle.
En parallèle, le diagnostic technique vise à vérifier la cartographie des applications utilisées au sein de l'entreprise. Il s'agit de recenser les logiciels métier (ERP, CRM, applications spécifiques) et d'évaluer leur niveau d’interopérabilité. • Les systèmes communiquent-ils efficacement entre eux ? • Sont-ils compatibles avec les applications des partenaires externes ? L’objectif est de déterminer si des problèmes d’intégration freinent la fluidité des processus et s’ils nécessitent des ajustements ou des remplacements.
Une part importante de cette phase concerne l’analyse des coûts de maintenance des systèmes en place. Il s’agit d’évaluer la rentabilité des investissements technologiques et de déterminer si certaines technologies sont devenues trop coûteuses à maintenir, notamment en raison de leur obsolescence. Les outils et infrastructures obsolètes augmentent non seulement les coûts, mais aussi les risques (pannes, failles de sécurité), et limitent la capacité d’innovation. Cette évaluation permet de formuler des recommandations pour le renouvellement technologique, par exemple la migration vers des systèmes plus performants et sécurisés.
Le diagnostic organisationnel constitue la troisième étape du processus et l’objectif principal est d’évaluer la gouvernance des systèmes d’information, ainsi que la gestion des relations entre la DSI et les métiers.
Le diagnostic organisationnel vise à évaluer le modèle de gouvernance en place au sein de la DSI.
L’objectif est d’analyser comment sont prises les décisions stratégiques et opérationnelles, notamment la priorisation des projets SI et l’allocation des ressources. Il s’agit d’évaluer la clarté des rôles et des responsabilités au sein de la DSI, ainsi que dans ses interactions avec les départements Métiers. Une gouvernance défaillante pourrait entraîner une mauvaise allocation des ressources sur des projets non prioritaires ou une absence de coordination entre les équipes Métiers et SI.
Il est nécessaire d’analyser la qualité de la collaboration entre la DSI et les métiers.
Cette analyse se concentre sur les processus de gestion de la demande et du portefeuille projet :
“Comment les besoins métiers sont-ils intégrés dans la conception et la mise en œuvre du portefeuille IT ? ”
Cette étape implique de recueillir les intentions de projet des différents départements, construire le Business Case et paramètres d’opportunité des solutions, suivre les bénéfices (Benefit Tracking).
La DSI est soit perçue comme un partenaire stratégique ou comme un simple support technique. Cette phase est critique dans l’évolution du numérique de l’organisation car est le centre névralgique de l’innovation.Une DSI déconnectée des réalités métiers proposera des solutions inadaptées, ou de ne pas être suffisamment réactive aux demandes.
Enfin, cette phase permet de mesurer la maturité des équipes (SI et métiers) face à la conduite du changement.
Une organisation mature en terme de conduite du changement est capable de déployer rapidement de nouvelles technologies, d’adapter ses processus de manière agile et de former efficacement ses équipes à l’utilisation des nouveaux usages et outils.
Cette capacité à gérer les transitions technologiques est cruciale dans un contexte où l'innovation est de plus en plus accélérée. Le diagnostic organisationnel permet de détecter les blocages dans la gestion du changement et de proposer des leviers pour renforcer la collaboration et l’agilité organisationnelle.
En résumé, ces trois phases du diagnostic de l'existant (métier, SI et organisationnelle) poursuivent des objectifs complémentaires qui, ensemble, offrent une vision à 360° des systèmes d’information actuels. Ces analyses permettent de dégager des recommandations stratégiques et opérationnelles pour améliorer la performance de la DSI, renforcer son alignement avec les métiers, et préparer les systèmes aux défis futurs.Comme indiqué ces phases passent principalement par des phases d’entretiens avec les parties concernées, c’est pourquoi nous vous proposons en plus de cet article, ce schéma sur comment bien mener un entretien .
Tips : Bien mener un entretien